Témoignage de Michelle

Bonjour à toutes et à tous,

J’ai été très fortement touchée par l’agoraphobie ainsi que la phobie sociale associée.

Voici quelle était ma situation, il y a encore quelques années :

Ma « maladie » -on peut dire que c’en est une dans ces cas-là, m’a d’abord fait perdre mon travail : secrétaire de direction dans un hôpital. Bref, après 5 années d’arrêt longue maladie et maladie longue durée, j’ai été contrainte et forcée de prendre « une retraite anticipée pour incapacité de reprendre mon travail ». Etre contrainte de prendre sa retraite avant 40 ans, ça n’est pas cool (sauf chez les militaires ou les sportifs). On doit se contenter de peu d’argent et les gens vous regardent bizarrement.
Bref, si le seul problème était là, ce ne serait pas le plus grave. Mais une fois chez moi (à la retraite), je ne pouvais pas sortir pour faire mes courses (pas de supermarchés, ni même de petits magasins, jusqu’à parfois ne pas pouvoir aller acheter mon pain à la boulangerie du coin ou guetter de la voiture s’il y avait du monde dans le magasin afin de ne pas avoir à attendre, car là, c’était impossible). Mes jambes en cas d’attente debout me donnaient la sensation de ne plus me porter et j’étais toujours obligée de m’accrocher à quelque chose ou de m’adosser. Pas facile, il m’est arrivée ainsi de renverser des étalages et de me faire encore plus remarquer, le comble quand on a peur des autres.
Impossibilité aussi de prendre le bus -le métro encore moins- et pour la voiture, je m’y sentais un peu protégée à condition que je l’utilise dans un périmètre donné et connu- pas loin de chez moi et surtout attention s’il y a une déviation, c’est l’angoisse car je peux me perdre et cela déclenchait la panique.
Marcher à pied aussi était difficile car comme je me sentais souvent vertigineuse, j’avais la sensation de tanguer. Cela devait d’ailleurs se voir, car des voisins m’avaient fait le remarque, pas follichon !
Peur d’être invitée (inventer des excuses bidon pour ne pas y aller), pas de ciné, de spectacles…

Et aussi la peur d’être seule chez moi. A cette époque, je vivais encore avec mon futur ex-mari et mes filles allaient au collège et lycée.Et donc , lorsque tout le monde était parti à ses occupations, j’étais seule chez moi et souvent la panique me prenait -peur de ce qui pouvait m’arriver si je tombais, si j’allais pas bien, si et si et si…. Je pleurais, je criais seule, même n’osant parfois plus trop bouger de peur de tomber. Bref, un vrai chemin de croix tout ça.

De vous en parler, c’est dur, mais je m’en suis sortie, même si je ne l’aurais jamais cru.

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J’ai d’abord suivi (comme pas mal d’entre nous) une thérapie classique, avec un psy non spécialisé dans les TCC ni même dans les phobies. Thérapie sur plusieurs années qui m’a servi à me connaître mieux certes et à parler de mes problèmes d’enfance liés à mon entourage (soeur handicapée). Cela m’a permis d’évacuer beaucoup de choses, y compris la perte de mon travail. Mais je n’améliorais pas mes troubles phobiques, malgré prise d’antidépresseurs et anxiolytiques.
Alors, j’ai essayé durant plus d’une année de voir un psy TCC. Au début, j’y croyais ferme. Des petits exercices à faire, noter mes angoisses sur un petit carnet. En même temps, j’avais réussi à sortir de temps en temps un peu plus le bout de mon nez dehors.Mais les rechutes étaient encore plus fortes et là, je ne faisais plus rien. Et le psy ne m’encourageait pas et même semblait dire que je n’y mettais pas du mien. Bref, j’ai arrêté avec lui, découragée.

Je pensais que je n’aurais jamais de solutions et que je resterai toujours ainsi. La vie me paraissait vraiment très triste.

L’idée de mettre en place une association de personnes « comme moi » germait depuis pas mal de temps, mais je ne savais comment réaliser cela avec tous mes troubles et angoisses. Lorsque j’ai enfin décidé de m’y mettre, j’ai fait connaissance -par personnes interposées- d’un psy TCC qui a été le bon (POUR MOI, bien sûr) cette fois ! Je précise « pour moi », car je suis réellement persuadée qu’un thérapeute qui convient à un patient ne sera peut-être d’aucun secours pour un autre.

Bref, cela a débouché sur 2 années de TCC. Les 6 premiers mois très hard, pour désamorcer la machine angoisses et paniques, et mes idées reçues. Mais quelle joie petit à petit de pouvoir refaire des choses simples pour tout le monde.

A chaque fin de séance, j’avais des exercices à faire quotidiennement chez moi ou hors de chez moi. Et je devais noter les pensées automatiques qui en découlaient (peur de m’évanouir, par ex…), le degré d’anxiété qui accompagnait (sur 10), et ajouter une pensée rassurante (si je m’évanouis, pas grave y’a du monde qui va me secourir).
Un travail de tous les jours pour réapprendre à monter dans un bus, un métro, aller me promener en ville, retourner dans un supermarché faire mes courses (seule, bien sûr), et petit à petit, aller dans une soirée, au ciné (d’abord accompagnée, puis près de la sortie au cas où…), etc.

Un travail de Titan que j’ai gardé chez moi (plusieurs cahiers et feuilles simples).

Et pas question de se désister de ce que j’avais à faire. C’était les consignes très strictes de mon psy.
Mais maintenant, je suis heureuse de n’avoir pas cédé à l’envie de me défiler.

Cette TCC a été pour moi un remède fabuleux à tous ces problèmes, même si ce fut dur et si j’ai dû prendre aussi un antidépresseur pour faciliter le travail de cette psychothérapie. J’ai aussi bénéficié du fait que la création de l’association Médiagora Lyon m’a forcée à me bousculer et à me battre pour faire quelque chose de constructif.

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Depuis 2005, j’ai la joie de revivre normalement. Bus, métro, sorties, vacances, être bien avec les autres car j’aime profondément les gens. Mes proches, mais aussi les membres de Médiagora Lyon qui sont un peu ma famille élargie.

Même si je sais que je suis toujours un peu fragile et que de temps en temps si je suis plus fatiguée ou si j’ai du souci, quelques symptômes peuvent réapparaître, je les connais et j’arrive à gérer et à me dire que c’est pas grave.
Ma devise maintenant : « profiter de tout ce que je peux faire qui me fait plaisir, car j’ai du temps à rattraper ».

Mais aussi, mon bonheur passe aussi par celui des autres et par l’aide que je peux leur apporter.
Voilà, j’ai été un peu longue, mais il m’était difficile de résumer davantage.

Victimes de l’Agoraphobie, ne vous découragez-pas, vous vous en sortirez un jour.
Mes encouragements vont également à tous ceux qui souffrent de Phobie Sociale ainsi que d’Anxiété Généralisée.

Michelle

NB: TCC = Thérapie Cognitive et Comportementale (et Emotionnelle)

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